Emily Loizeau démarre la tournée promotionnelle accompagnant la sortie de son deuxième album avec trois dates parisiennes. C'est à l'Alhambra, pas le célèbre music-hall parisien démoli dans les années 1960 mais la nouvelle salle inaugurée en 2008, qu'Emily Loizeau a choisi de rôder le tout nouveau spectacle mis en place pour Pays Sauvage. La première partie de la soirée est l'occasion de découvrir Kyrie Kristmanson.

Kyrie Kristmanson est Canadienne. Elle a grandi en Ontario, province du Canada où l'on parle anglais mais qui voisine le Québec dont la langue officielle est le français. Kyrie parle donc anglais mais se débrouille plutôt pas mal en français, au point que certaines de ses chansons sont écrites dans notre langue. Un premier album autoproduit sorti en 2006, The Kyrie K Groove, lui a valu d'être nommée Best Young Performer of the Year aux Canadian Folk Music Awards de 2007, soit l'équivalent de notre révélation de l'année aux Victoires de la Musique. Quant à son deuxième album, Pagan Love, sorti en 2008, il s'est classé dans le Top 30 canadien dans le mois qui a suivi sa sortie.

Encore peu connue chez nous, la jeune femme a décidé de renverser la vapeur... Installée depuis peu à Lyon, elle accompagnera Emily Loizeau sur bon nombre de dates jusqu'à l'été et se produira également au Printemps de Bourges en Avril. Chantant en anglais ou en français, a cappella ou s'accompagnant à la guitare acoustique et occasionnellement à la trompette, Kyrie Kristmanson va s'employer à séduire le public français. Son univers acoustique singulier, sa voix éthérée, ses chansons fusionnant pop, folk et jazz emporteront l'adhésion de la salle et si le premier titre, "Song X", reçoit des applaudissements polis, "Too Hot To Touch" est acclamé et c'est une ovation qui ponctue "Dans un Vent Noir" chanté a cappella.

Emily Loizeau aurait dû commencer sa tournée 2009 par deux dates à Sannois, la semaine dernière, afin de régler les derniers petits détails d'un tout nouveau spectacle. Hélas, une maudite extinction de voix en a décidé autrement et c'est sans filet qu'Emily se retrouve face au public parisien pour trois soirées à l'Alhambra...

Plutôt que de mélanger titres anciens et chansons nouvelles en une setlist équilibrée, Emily Loizeau a choisi d'axer son spectacle sur Pays Sauvage, sorti il y a tout juste un mois. Le pari est audacieux et il fallait oser le faire. Les fans qui attendaient "Jalouse", "Je Ne Sais Pas Choisir" ou "Voila Pourquoi" se contenteront de "L'Autre Bout Du Monde" et "I'm Alive" chantés lors du rappel. Pas de quoi être déçu pour autant car le spectacle est vraiment remarquable et d'une très grande richesse. On avait laissé une chanteuse quittant rarement son piano, s'en servant presque comme d'un rempart entre sa timidité et le public, et se produisant en une formation assez restreinte puisque seuls Olivier Koundouno et Cyril Avèque l'accompagnaient... On la retrouve aujourd'hui en pleine lumière, plus souvent face au public que derrière son clavier, et à la tête d'un ensemble conséquent de musiciens.

Sur une petite intro pleine de bruits étranges et de grincements, de ceux que l'on entend quand on s'est perdu en forêt, Emily Loizeau attaque avec "Le Coeur d’un Géant" et nous entraîne illico avec elle. Elle est au piano pour ce premier morceau mais elle le quittera bien vite pour l'incantatoire "Fais Battre Ton Tambour". Pieds nus, vêtue d'une longue robe, n'hésitant pas à danser et sauter, Emily Loizeau se pose en grande prêtresse d'un monde enchanté qu'elle nous invite à rejoindre, un univers féérique qu'elle a bâti autour de son Pays Sauvage.

Si les Moriarty ne sont pas là ce soir, les invités sont cependant nombreux. Mathis (de Mathis and the Mathematiks) sera à la guitare pendant toute la soirée et c'est lui qui va s'y coller pour remplacer - de façon fort convaincante - Thomas Fersen sur l'hilarant "The Princess and the Toad".

David-Ivar Herman Düne viendra prêter main forte, à la guitare et aux choeurs, le temps de quelques titres, en particulier sur l'émouvant "Tell Me That You Don’t Cry" qu'Emily fait au piano, sur un "Sister" déchirant qu'elle dédie à sa soeur présente ce soir, ou sur l'excellent "Coconut Madam" et sa rythmique du tonnerre. Jocelyn West est également venue spécialement de Londres et une section cuivres prêtera son concours...

Pour ce qui est des complices habituels, seul Olivier Koundouno est là, toujours impeccable derrière son violoncelle mais Cyril Avèque, victime d'un accident de la circulation (heureusement pas trop grave) quelques jours seulement avant le démarrage de la tournée, a dû cèder sa place à Tatiana Mladenovitch aux percussions. Rude boulot pour la jeune femme... Les percussions, et c'est l'une des belles réussites ici, jouent en effet un rôle quasi central dans les orchestrations de ce spectacle...

La soirée s'achève en beauté sur un rappel impeccable. On retient son souffle sur le superbe "Dis-moi Que Tu Ne Pleures Pas", dépouillé à l'extrême en un très beau voix violoncelle, puis, Emily Loizeau nous offre deux morceaux de L'autre Bout du Monde en guise de bonsoir. Magique !

SLB


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