16 Novembre 2008, Paris, Elysée Montmartre... Sans le savoir, j'assiste à mon dernier concert d'Alain Bashung. Pas de second rappel ce soir-là, ni d'un dernier "Angora" pour la route... Bashung est fatigué et doit sortir de scène soutenu par l'un de ses musiciens. Malgré cela, il aura offert, une fois encore, le meilleur de lui-même et deux heures absolument fabuleuses. J’ai une crève démente, de la fièvre et les yeux d'un lapin myxomatosé mais chaque seconde est un vrai bonheur... 16 Novembre 2009, drôle de coïncidence, Dimanches à l'Elysée est dans les bacs... Je ne sais s'il faut se réjouir ou pleurer. Je choisis de me réjouir. Si ce live existe aujourd'hui, c'est que Bashung l'a voulu. Et s'il avait disparu moins vite, ce disque aurait quand même vu le jour. Prenons-le donc en tant que tel, un excellent enregistrement d'un concert magnifique et le dernier témoignage d'un artiste au sommet de son art.

Ces vingt dernières années, Bashung n'aura aligné que des chefs d'oeuvre. Peu d'artistes peuvent se targuer d'une telle performance. En 1989, Novice marque la dernière collaboration entre Bashung et Boris Bergman. Ce disque, bizarrement, ne rencontre pas le grand public alors même qu'il recèle de sombres merveilles comme "Légère Eclaircie", "Intrépide Malgré La Fièvre", "Étrange Été" ou "Bombez !". C'est aussi la deuxième incursion, après Play Blessures, de Bashung dans un univers de sonorités cold wave. L'album est une vraie réussite mais reste sans doute trop avant-gardiste pour un public davantage versé dans la chanson française que dans le rock. En 1991, Osez Joséphine abrite des joyaux tels "Volutes", "Madame Rêve", "Happe" ou encore cette superbe reprise de "Nights In White Satin". Jean Fauque a remplacé Boris Bergman. Osez Joséphine signe le retour du succès auprès du public. En 1994, Chatterton n'aligne quasiment que des splendeurs... "A Perte De Vue", "J'ai Longtemps Contemplé", "Après d'Apres Hostilités", "Un Âne Plane" ou "L'Apiculteur"... Le grand public n'en retient que "Ma Petite Entreprise". Avec Fantaisie Militaire (1998), Bashung devient enfin n°1 dans le coeur des français. Récompensé de trois Victoires de la musique, cet album est l'un des plus grands succès commerciaux d'Alain Bashung. Il était temps. Et c'est vrai qu'il aurait fallu être sourd pour rester indifférent aux douze sublimes morceaux de cet album et pour considérer "Malaxe", "La Nuit Je Mens", "Fantaisie Militaire", "Mes Prisons" ou "Angora" autrement que comme de vrais miracles. L'Imprudence (2002), noir, incroyablement ambitieux, reste incompris malgé un excellent accueil critique. C'est la dernière fois qu'Alain Bashung s'investira autant sur un disque. Enfin, en 2008 paraît un Bleu Pétrole quasi parfait.

Ce sont ces vingt dernières années (à l'exception de "Volontaire" et "Vertige de l’Amour") que Bashung avait choisi de revisiter lors de la tournée "Bleu Pétrole" entamée aux Chorus des Hauts de Seine en Avril 2008. Dimanches à l'Elysée, au travers de deux CD, concentre donc tous ces petits chefs d'oeuvre interprètés avec un line-up de grande classe. Jean-François Assy au violoncelle et Yan Péchin à la guitare abattent un boulot énorme, tout en finesse. On n'aurait pu rêver meilleurs musiciens pour accompagner Bashung. Rien à redire, ce live est superbe de bout en bout... Du grandiose "Comme Un Lego", qui ouvre le concert, jusqu'au final "Nights in White Satin", on s'y croirait... Ne manque hélas que Bashung... Un disque indispensable !